750 grammes
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17 avril 2013 3 17 /04 /avril /2013 16:30

Pour tout gastronome qui se respecte, il est des chefs dont il faut avoir goûté la cuisine au moins une fois dans sa vie. Il n'y en a pas 50, et si on s'intéresse un peu à l'histoire de notre cuisine, sans forcément la mettre en opposition avec celle qui commence aujourd'hui et qui sera celle de nos enfants demain. Ces quelques "vieux" briscards de notre gastronomie constituent indiscutablement notre patrimoine gourmand.
Certains veulent les mettre à la retraite, remettent leurs étoiles en questions, mais qui sont-ils ces abrutis qui n'en serait pas là à écrire toutes sortes de conneries si ces chefs n'avaient pas existé?
Aujourd'hui on en pince pour tous les as de la cuisine naturelle, c'est le gros mouvement actuel, tous les chefs en vogue ont dans le sang des particules Iberiques, nordiques, Passardienne, j'en passe et j'en suis.
Mais je ne dénigre pas les mastodontes, ceux qui dans les folles années entre 60's et 80's faisaient et refaisaient notre patrimoine gourmand. Il est d'ailleurs rare que ce soient ces chefs actuels bondissants qui mettent au placard nos bons vieux Tontons flingueurs des fourneaux. Je ne m'étendrai pas sur Bocuse, Troigros, Senderens et cie mais pousserai simplement les portes des Prés d'Eugènie pour m'installer dans les magnifiques salons; un verre à la main, bercé par le feu qui crépite, accueil charmant de rigueur.oreiller-moelleux.JPGOn est ailleurs et pourtant si proche de nous même. Ici le bois a du vécu, il ne sort pas d'un catalogue d'archi Suédois, les tomettes non plus. Des commodes trônent en dessous des tableaux, il y a des tapis, les cheminées dansent alors que la pluie fouette dehors; c'est un luxe d'autrefois dans lequel il fait bon naviguer. Confortablement installé, fermons les yeux et laissons nous bercer.
Tiens, Michel Guérard qui passe, "bonjour chef", madame, puis mesdemoiselles, une famille entière soucieuse de notre bien être, n'est-ce pas là une belle occupation?
Il est temps de passer à table dans une salle qui ne manque pas de tenue, on nous présente le pain, "enchanté", on le rompt et on verse le vin, amen.
Premier plat "signature", l'oeuf poule au caviar à la coque comme à la cour de Russie a la tête que l'on attend. Point de vodka à l'horizon, nous sommes dans les Landes, ce sera donc une fine d'Armagnac "maison". Rien à dire, de Tsar je passe à Pacha, c'est simple et très bon, de quoi aiguiser l'appétit avant de fondre sur l'Oreiller moelleux de mousserons et morilles aux Asperges de Pays. Encore une fois, c'est tel que l'imagination l'avait façonné dans mon cerveau gourmand, une douce crème de champignons cachant une grosse raviole, c'est généreux, délicieux sans être fantasque, un grand classique sans surprise mais exquis.homard.JPGLe demi-homard légèrement fumé à la cheminée est lui traité magnifiquement, une cuisson d'une rare précision que je n'avais jamais rencontré jusqu'alors. En fait, la coque est fumée seule dans la cheminée et elle vient apporter ce léger fumet à la chair encore translucide mais cuite, rare.
Quitte à jouer la partition Guérard à fond, me voilà ensuite parti sur le "Filet de Boeuf sur le bois et sous les feuilles, jus de viande et de raisin, pommes crémeuses à la truffe et pommes soufflées", plat plus récent puisque datant de 2011.
Le cérémonial du boeuf arrivant fumant sous la feuille avant découpe me tire de mes doux songes, relance la machine et m'éclate les papilles avant même d'avoir croqué le filet. C'est parfait, la viande "croûtée" est remarquable, les jus terribles et les pommes soufflées, ah les pommes soufflées, c'est si rare d'en trouver encore sur une carte que je ne peux qu'acquiescer la bouche pleine!
Pour les desserts, j'aurais mieux fait de taper dans la délicieuse crêpe soyeuse à la neige selon Antonin Carême, car même si j'ai aimé me vautrer dans le classicisme ce soir, le millefeuille aux framboises était vraiment trop vulgaire pour moi.boeuf.JPGPas de grands frissons mais la quiétude du bienheureux. C'est le genre de repas qui vous fait rêver après un enchaînement de 2-3 tables "modes", mais qui vous donne envie d'y retourner le repas fini. C'est un peu bizarre ce que je dis, je le sais bien mais c'est ce que je ressens. Ça me rappelle un dîner chez Bocuse, même si j'ai mieux dîné aux Prés d'Eugènie.
Je sortais de chez Berasategui (Pays basque espagnol), pourtant déjà assez classique par rapport à d'autres et étais content d'aller taper de la soupe VGE et autre poularde en vessie à Collonges. Pourtant, malgré le bonheur d'avoir serré la main à ce grand monsieur qu'est Paul Bocuse, au moment de la poularde, servi avec quelques légumes, un riz pilaf et une sauce blanche, je ne rêvais que d'une chose, me retrouver attablé à nouveau chez Martin Berasategui.
J'ai évolué depuis, goûté beaucoup d'autres cuisines; et quand je me retrouve les couverts à la main chez Mr Guérard, j'ai en tête la bande de gais lurons des 70's, ceux-là même qui venaient taquiner les vieux préceptes d'Escoffier et je suis heureux, fiers d'être en sa maison.pommes-soufflees.JPGNotons que ce jeune quarantenaire, MOF pâtissier alors qu'il était au Crillon, 2 étoiles Michelin en banlieue Parisienne, puis Landais par madame, venait déjà remettre en cause les grosses sauces, les surcuissons, privilégiant le local, les marchés, mettant déjà en avant le principe de régionalité… En fin de compte, n'est-ce-pas exactement les mêmes préceptes "logiques" mis en avant aujourd'hui? Peut-être plus radicalisés c'est vrai, mais on reste néanmoins sur des notions de terroir et de terre, de paysan, de local quoi.
Je ne saurais que conseiller d'économiser à ceux qui voudraient connaître le frisson d'une grande maison comme il ne s'en fait plus. Dés la première goutte de doux breuvage avalée dans les moelleux fauteuils des salons, il vous semblerait presque normal de voir passer à la fenêtre l'impératrice Eugénie et sa cours, suivi de Napoléon III qui vous ferez un petit coucou de la main.
La maison propose un premier menu "des Français" à 120€ entrée, plat et dessert, vin des vignes de Mr Guérard à discrétion, ce n'est pas volé.

Je ne me vois pas finir sans avoir dit un mot sur une équipe formidable, un maître d'hôtel à la fois maître en son domaine, rieur et sautillant, de jeunes serveurs et serveuses adorables, bref, un vrai bonheur de A à Z.


Les Prés d'Eugénie . 40320 Eugénie-les-Bains . 05 58 05 06 07

                                                          www.michelguerard.com

Je finirai sur une anecdote gourmande trouvée sur Wikipédia, preuve que l'avenir gastronomique d'Eugènie-les-bains était tracé depuis bien longtemps, depuis sa création…

"En 1862, l'impératrice accompagne son mari Napoléon III venu inaugurer la nouvelle ligne de chemin de fer Tarbes-Morcenx. Surprise par le mauvais temps, l'impératrice trouve refuge sans se présenter chez Marthe-Alice Pouypoudat, fermière des environs de Saint-Loubouer. La réputation des roulades à la farce de caille et de jambon de Chalosse, spécialité de Marthe-Alice Pouypoudat dont elle garde jalousement le secret, est déjà parvenue aux oreilles de l'impératrice. Le mauvais temps perdurant, cette dernière demande à se restaurer. La fermière n'a pas reconnu l'impératrice, mais ne doute pas avoir affaire à une grande dame. Sans doute impressionnée, et poussée par l'envie de faire encore mieux, elle a l'idée d'ouvrir une de ses miches en train de finir de cuire dans le four à pain, et d'y glisser la fameuse roulade encore chaude. Elle découpe ensuite ce pâté en tranches et l'offre à son invitée en l'arrosant d'une sauce salmis préparée avec du vin de Tursan rouge de sa vigne. L'impératrice est conquise et une amitié se noue entre les deux femmes, qui entretiennent par la suite une correspondance régulière. En remerciement de sa généreuse hospitalité, Eugénie invite Marthe-Alice à l'Exposition Universelle de Paris de 1867. On lui présente à cette occasion le maître-queux du palais des Tuileries à qui elle révèle gracieusement le secret de sa recette par amitié pour l'impératrice. La cour en est ravie et donne à la recette le nom de « Pain Farci en Croûte Belle Crinoline ». Marthe-Alice Pouypoudat est aujourd'hui considérée comme l'une des premières grandes cuisinières landaises dont la renommée est « montée » jusqu'à Paris".



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commentaires

S
Oh my! I’m at complete loss of vocabulary. Trust me guys. That is the most delicious dish I have ever had. I would prefer fresh carrot instead of the sugar syrup. Its an excellent mix. Anyway, thank you so much for sharing.
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  • : Rod n Roll
  • : 150g de recettes, 225g de restaurants, 75g de pensées culinaires, que dis-je,d'envolées lyriques: C'est la gastronomade'n'roll. Shake it & Check this blog Contact: rlafarge@hotmail.fr
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